Recommandations pour une bonne photoprotection chez tout type d’individu

Par le Docteur Marie LEMOIGNE et le Docteur Hervé DUTARTRE Consultation Porphyries CHU de NANTES

⦁ l’utilisation d’un produit de protection solaire (PPS), même de fort indice comme 50+, n’assure pas une protection à 100 %. Il arrête bien les UVB mais laisse passer une partie des UVA. Or les UVA sont aussi dangereux que les UVB. Il est donc indispensable d’adopter certains réflexes:
Evitez de vous exposer entre 12h et 16h (heures d’été)
Portez des vêtements et accessoires protecteurs chapeau, lunettes de soleil)
⦁ Utilisez un produit de protection solaire adapté à la couleur de votre peau et aux conditions d’exposition, pour les parties du corps exposées au soleil
⦁ ne prolongez pas le temps d’exposition sous prétexte d’avoir utilisé un PPS
⦁ ne réduisez pas la quantité et la fréquence d’application du PPS sous prétexte d’avoir utilisé un indice de protection solaire très élevé.
⦁ n’oubliez pas certaines surfaces corporelles lors de l’application du PPS: les oreilles, les tempes, la nuque, le dos des mains et des pieds…
⦁ pensez à utiliser un PPS même en cas de faible couverture nuageuse car celle-ci ne fait pas nécessairement obstacle aux rayonnements UV.

ATTENTION:

⦁ Le bronzage ne remplace pas les PPS – continuer à appliquer régulièrement et en quantité suffisante un PPS adapté au phototype et à l’ensoleillement.
⦁ Ne confondez pas entre « produits de protection solaire » et produits dits « solaires » autobronzants ou accélérateurs de bronzage.

 

Particularités de la photoprotection pour les porphyries à expression cutanée

(protoporphyrie érythropoiétique, porphyrie variégata, porphyrie cutanée tardive)
Le spectre du rayonnement solaire qui déclenche les brûlures cutanées dans les porphyries cutanées est une bande autour de 400 à 410 nm ce qui correspond au début de la lumière visible : la lumière bleue.

Les produits de protection solaire arrêtent la plupart des UV mais pas la lumière visible : c’est ce qui explique que les PPS sont inefficaces pour prévenir les poussées de porphyrie à expression cutanée.
Très récemment 3 PPS ont été mis sur le marché, qui offrent une protection contre la lumière bleue . Ils sont donc à privilégier :

Photoderm M des laboratoires Bioderma (il est teinté, aspect de fond de teint)
Anthélios 50+ UV Mune 400 (invisible)
Avène 50+ Intense protect (invisible)

QUESTIONS-REPONSES
Vous nous avez transmis des questions auxquelles il a été répondu lors de l’Assemblée Générale. Vous trouverez ci-dessous les réponses apportées par les Docteurs Neila TALBI et Laurent GOUYA :

« J’envisage d’avoir des enfants. Comment savoir si je transmettrai ou non la maladie ?
Quels tests dois-je réaliser ? »
Le mode de transmission des porphyries varie d’une porphyrie à l’autre et nécessite une
consultation au CRMR Porphyrie pour les explications.
1/ PPE : une mutation FECH et un allèle hypomorphe FECH avec la participation différente
des deux parents.
2/ XLDP : dépend du sexe du parents atteint.
– Si c’est une femme, ses enfants ont un risque sur deux de recevoir la mutation. Les hommes
sont plus malades que les femmes en général.
– si c’est un homme : toutes ses filles sont atteintes, ces garçons ne le sont jamais.
3/ PAI, PV, CH, PCf : Un risque sur deux chez les enfants d’un parent porteur de la maladie
4/ Günther : aucun risque de transmettre sauf si les parents sont consanguins.
Il faut que le diagnostic soit complet chez soi avant de se présenter dans un centre pour faire
dépister ses enfants. Pour savoir si je risque de transmettre, il faut déjà avoir bénéficié d’un dépistage avec la
recherche de la mutation et du déficit enzymatique.

« Je suis porteuse d’une PAI et je suis en début de grossesse et je voudrais savoir si je dois
faire un diagnostic prénatal comme pour la trisomie 21 ? »
Il n’y a pas de diagnostic prénatal pour les porphyries hépatiques aigues puisque ce sont pas
des pathologies graves, cela ne justifie donc pas la réalisation d’un diagnostic prénatal.
La seule porphyrie pour laquelle ce diagnostic est fait c’est la PEC (Gunther) parce qu’il n’y a
pas de traitement et que c’est une maladie très grave le plus souvent.

Question PPE « Pour le suivi des recommandations de prévention (prise de sang et
échographies, qui fait mes ordonnances ? »
C’est variable : pour les patients suivis au centre de référence, c’est le centre qui les fait. Pour
les autres, le médecin traitant est l’interlocuteur à privilégier. Les recommandations de
prévention rédigées par le Centre Français des porphyries peuvent être présentées aux
médecins traitants leur permettent de rédiger plus facilement cette ordonnance. Si le
médecin traitant ne souhaite pas les faire, nous pouvons évidemment les faire. Dans tous les
cas, une consultation au moins tous les 3 ans est souhaitable au centre de référence.

« J’ai une PPE, quelles crèmes solaires me conseillez-vous pour me protéger de la lumière ? »
Les crèmes efficaces sont celles qui protègent contre la lumière bleue (Longueur d’onde
autour de 405 nanomètres), il faut des crèmes « jaunes » qui arrêtent le bleu pour que la
lumière bleue ne pénètre pas dans le derme.
Ainsi la crème Photoderm M de Bioderma (protection lumière bleue) a montré son efficacité.
Les crèmes anti UV ne sont pas efficaces pour la PPE
Merci de lire les recommandations du Professeur Dutartre que nous vous joignons.

« J’ai une PPE et mon pharmacien m’a annoncé que le bêta-carotène que je prends depuis
plusieurs années et qui me protège bien est déremboursé dès le mois d’avril 2023. Le
traitement coûtera 200 euros par mois. Comment faire ? »
Vous pouvez toujours solliciter l’association pour une aide financière qui sera étudiée au cas
par cas par le bureau (Réponse de Sylvie Le Moal).
Le bêta-carotène que certains patients apprécient beaucoup n’a pas vraiment montré son
efficacité, attention il est absolument contre-indiqué aux fumeurs et aux personnes ayant fumé.

Question de PAI : « Je suis âgée et je ne sais pas me servir d’internet, comment me
procurer la liste des médicaments dits « interdits » qui m’était envoyée avant … »
Beaucoup de patients porphyriques ont pris des médicaments « déconseillés » sans jamais
avoir de problèmes ce qui rend difficile les recommandations et doit toujours amener à 3
respecter le rapport bénéfice risque. En cas de maladie grave nécessitant un médicament
contre indiqué, on le donnera quand même au patient moyennant une surveillance clinique
et biologique adéquate. En cas de crise, on dispose de tous les traitements nécessaires.
Pour ceux qui ont internet, la liste est disponible sur le site www.porphyrie.net et pour les
personnes qui n’ont pas internet, elles peuvent demander une liste papier au centre de
référence (0147606334) qui la leur enverra immédiatement.
Attention, en cas d’accident et dans l’urgence vitale, la porphyrie n’est pas le problème et il
n’est pas nécessaire de respecter les contre-indications médicamenteuses. Il faut déjà sauver
le patient. On s’occupera de la porphyrie dans un second temps.
Par contre, en dehors de l’urgence vitale, comme en cas d’une opération programmée, il faut
que l’anesthésiste appelle le Centre Français des porphyries.
Il existe une carte de porteur d’une porphyrie qui est disponible au Centre Français des Porphyries.

« Pour les personnes qui font des UV, est-il possible d’avoir toutes les informations
possibles ? Comme à partir de quand ? Ou le faire ? Est-ce remboursé ? »
Une prescription d’UVB est toujours possible mais les soins doivent être dispensés uniquement chez le dermatologue. Oui c’est remboursé, sur ordonnance. Il est possible de réaliser 200 séances vie entière, au-delà il faut arrêter pour ne pas favoriser l’apparition d’un cancer de la peau.

« Comment faire pour que les secours trouvent sur moi une indication de ma PAI avant
d’être endormi (où faut-il l’indiquer les dangers de l’anesthésie … ?) »
En urgence vitale, rien (et donc pas la porphyrie) ne doit ralentir la prise en charge. Elle devient
secondaire. C’est le principe du bénéfice-risques. Une carte de porteur existe et peut être obtenue au Centre Français des Porphyries.

« Je souffre d’une PPE et j’ai envie de voyager. Forcément c’est assez compliqué.
Je me demande s’il y a des endroits dans le monde où il est possible de s’exposer plus
qu’en France ? Est-il possible que l’on puisse être moins sensible dans des endroits ou par
exemple l’angle des rayons du soleil est différent ? Est-ce que vous avez des témoignages
sur ce sujet ? »
Vous pouvez aller PARTOUT si vous êtes protégé :
4 Aucun endroit n’est favorable où le soleil est fort. IL faut absolument se protéger avec des textiles et
des crèmes adaptées.
A certains endroits dans le nord et l’ouest de la France c’est parfois pire que dans le sud.
Il nous est rapporté des histoires surprenantes. Il existe de nombreux témoignages de patients PPE
expliquant qu’ils ont été moins sensibles au soleil sous les tropiques qu’en France métropolitaine.
L’humidité, le vent, la lumière diffuse comme en Bretagne peuvent accentuer l’inconfort.
De façon générale les rayonnements plus verticaux seraient plus supportables. On note qu’il y a plus
de malades au Nord qu’au Sud.

« Je voudrais savoir si Le vaccin Covid a des répercussions sur la porphyrie ? Quel
traitement précoce du Covid 19 serait possible pour les personnes à risques graves qui ont
une PAI ? (Paxlovid contre indiqué à cause du Ritonavir ou application de la balance
bénéfices/risques ? »
Non, il n’y a aucune répercussion apriori du vaccin sur les porphyries. Mais tout vaccin peut provoquer
une réaction, en particulier de la fièvre, qui favorisent le déclanchement des crises.
Il faut néanmoins privilégier la protection contre la maladie et donc se faire vacciner tout en restant
vigilant en cas de douleur abdominale dans les jours qui suivent l vaccination.
La Covid, comme toutes les maladies infectieuses, peut induire une crise de porphyrie.

J’ai une Porphyrie Cutanée familiale et je voudrais savoir pour quels médicaments je dois
prendre des précautions ?
Il y a peu de médicaments contre-indiqués, quelques rares médicaments, les hormones
essentiellement comme par exemple dans les pilules contraceptives.
En dehors d’une poussée de porphyrie cutanée, il est possible d’essayer une contraception orale sous
surveillance médicale et biologique pour s’assurer que la patiente tolère bien la contraception, ce qui
est le cas le plus fréquent. L’alcool est à limiter au minimum.

Les Avancées Scientifiques Récentes sur les Porphyries

Ces dernières années, plusieurs avancées majeures ont été réalisées dans le domaine de la recherche sur les porphyries, offrant de nouveaux espoirs tant pour le diagnostic que pour le traitement de cette maladie rare.

1. Avancées dans les traitements ciblés

L’une des percées les plus prometteuses concerne les traitements ciblés pour les porphyries hépatiques aiguës. Des thérapies comme le givosiran, un traitement basé sur la technologie ARN interférent, ont prouvé leur efficacité dans la réduction des crises aiguës. Ce médicament agit en réduisant les niveaux toxiques de précurseurs de l’hème, responsables des symptômes de la porphyrie aiguë. Les essais cliniques continuent de fournir des résultats encourageants pour cette option thérapeutique innovante, notamment pour les patients atteints de porphyrie hépatique sévère.

2. Bitopertin pour la porphyrie érythropoïétique

Un autre traitement prometteur est bitopertin, actuellement en phase II d’essais cliniques. Ce médicament vise à réduire les niveaux de protoporphyrine IX, une substance à l’origine des symptômes photosensibles de la porphyrie érythropoïétique. Si les résultats de ces essais sont concluants, bitopertin pourrait offrir une nouvelle option de traitement pour les patients souffrant de cette forme sévère de porphyrie cutanée, souvent associée à des douleurs invalidantes lors de l’exposition au soleil.

3. Progrès dans le diagnostic génétique

Le diagnostic des porphyries a également bénéficié des avancées en matière de séquençage génétique. Les recherches récentes ont montré qu’un grand nombre de personnes porteuses des mutations responsables des porphyries ne sont pas diagnostiquées en raison de symptômes peu spécifiques. Des études génétiques approfondies, comme celles menées au Royaume-Uni, ont permis d’identifier un nombre bien plus élevé de porteurs de mutations que prévu, ce qui suggère que la porphyrie pourrait être sous-diagnostiquée.

4. Approches pour la gestion des symptômes cutanés

Des lignes directrices consensuelles récentes ont été publiées concernant la gestion des porphyries cutanées telles que la protoporphyrie érythropoïétique (EPP). Ces recommandations incluent l’importance d’un suivi constant des patients, la gestion des symptômes par des traitements médicamenteux comme l’afamelanotide, ainsi que des mesures préventives pour éviter l’exposition au soleil. Ces recommandations sont le fruit de collaborations internationales et visent à améliorer la qualité de vie des patients.

5. Collaboration internationale et symposiums

La recherche sur les porphyries bénéficie grandement des collaborations internationales. Des conférences scientifiques, comme l’ International Porphyrias Symposium de 2023, rassemblent des chercheurs du monde entier pour partager les dernières découvertes en matière de diagnostic, de traitement et de gestion de la maladie. Ces échanges permettent d’accélérer le développement de nouvelles thérapies et d’optimiser les soins aux patients.

Conclusion

Ces récentes avancées montrent que la recherche sur les porphyries progresse rapidement, offrant de nouveaux espoirs aux patients touchés par ces maladies rares.

Pour en savoir plus sur ces recherches, vous pouvez consulter les publications suivantes :
Avancées dans le traitement des porphyries hépatiques
Nouvelle thérapie pour la porphyrie érythropoïétique